Short Description
Les Perses, les Turcs, les Berbères, et autres ont constitués la nation musulmane et qui étant tous égaux ont contribués au développement des sciences
Les Perses, les Turcs, les Berbères, et autres ont constitués la nation musulmane et qui étant tous égaux ont contribués au développement des sciences _ naturelles, juridiques, littéraires, humaines_ et à la création d’une grande civilisation nouvelle et différente de celle qui l’ont précédée.
L’islam proclame clairement l’unité de l’humanité, une unité qui englobe tous les peuples du monde. Tous partagent les mêmes droits et la même dignité : « Ô êtres humains ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons répartis en nations et en tribus pour que vous vous connaissiez les uns les autres. Le plus noble d’entre vous auprès de Dieu est le plus pieux. »[1]
C’est grâce à cette vision que la nation musulmane a pu, après l’expansion de l’islam, être constituée d’une multitude de peuples aux caractéristiques ethniques différentes. Chacun de ces peuples si divers possédait son patrimoine culturel, ses connaissances et savoir-faire divers, qui en fusionnant ont donné lieu à une civilisation unique par la diversité de ses talents et de ses énergies humaines et naturelles.
Les compétences artistiques, culturelles et scientifiques diverses de ces peuples du monde musulman (les Perses, les Turcs, etc.) se sont assemblées pour constituer cette nouvelle civilisation et ont participé à l’édification d’une grande civilisation humaine. De ce fait, la diversité des peuples du monde musulman est un facteur important à l’origine de la richesse de la civilisation musulmane, un facteur qui a largement contribué à son élaboration.
Prenons l’exemple de la Perse : lorsque Dieu a ouvert ce pays aux musulmans, les Perses se sont mélangés aux musulmans : ils ont appris de ces derniers les valeurs et la beauté de l’islam, ils ont vu que c’était une religion de fraternité, d’égalité, de solidarité et de compassion mutuelle, d’amour et de désintéressement, et ils y sont entrés en masse. Ils ont étudié la langue, la langue de la religion qu’ils avaient aimée et choisie, et se sont approprié cette langue afin de mieux comprendre leur religion.[2]
L’amour de cette religion et de sa langue s’est rapidement exprimé à travers d’importantes contributions à l’essor scientifique et à la production d’ouvrages. Les Perses ont excellé dans ces domaines et la civilisation musulmane en a tiré de nombreux bénéfices.
Ainsi, par exemple, au niveau linguistique, la langue perse possédait certains termes désignant des faits de civilisation, et qui n’avaient pas d’équivalents dans la langue arabe. Ces termes ont été empruntés et intégrés par la langue arabe. C’est le cas de termes administratifs comme dîwân ou bîmâristân.
De nombreux Perses ont également brillé dans les différentes sciences arabo-musulmanes. Dans le domaine des sciences du hadîth ont peut ainsi citer les noms d’al-Hasan al-Basrî[3], Muhammad ibn Sîrîn[4], Abû `Abdallâh al-Bukhârî[5], parmi tant d’autres qui ont contribué de façon remarquable aux sciences du hadîth. Les Perses ont également donné à la jurisprudence musulmane des savants aussi éminents que l’imam Abû Hanîfa[6] ou al-Layth ibn Sa`d[7]. Ils ont produit des écrivains comme `Abd al-Hamîd al-Kâtib[8] ou Ibn al-Muqaffa`[9], des poètes comme Bashâr ibn Burd[10] ou Abû Nuwâs[11], etc. Ces différents auteurs ont apporté à l’art littéraire et poétique leur style et leur mode d’expression propres. Il en fut de même avec le développement fulgurant de la science et de la composition d’ouvrages de sciences islamiques à l’époque abbasside, et le mouvement de traduction en langue arabe de nombreux ouvrages savants.
Le même processus de brassage culturel permit le transfert vers la civilisation musulmane de connaissances de l’Inde et d’autres cultures orientales, à travers cet essor scientifique.[12]
Il est à noter que ces nouveaux peuples musulmans ont produit de grands savants, non pas seulement dans les sciences religieuses et linguistiques, mais également dans les sciences de la vie et de l’univers. Ils ont excellé dans la médecine, l’astronomie, l’algèbre, la géométrie, etc. L’impulsion qu’ils donnèrent à la civilisation musulmane joua un rôle déterminant dans son édification et dans le cours qu’elle devait prendre. Il suffira de citer de brillants savants tels qu’al-Khawârizmî[13], Ibn Sînâ (Avicenne)[14] ou encore al-Bîrûnî.
Az-Zuhrî[15] a rapporté que Hishâm ibn `Abd al-Malik lui demanda qui dominait à La Mecque ; il répondit : `Atâ’.[16] Et au Yémen ? Il répondit : Tâwus[17]. En Syrie ? Il répondit : Makhûl[18]. En Egypte ? Il répondit : Yazîd ibn Abî Habîb[19]. En Arabie ? Il répondit : Maymûn ibn Mahrân[20]. Et au Khorassan ? Il répondit : ad-Dahhâk ibn Muzâhim.[21] Et à Bassorah ? Il répondit : al-Hasan ibn Abî al-Hasan. Et à Kûfa ? Il répondit : Ibrâhîm an-Nakh`î[22]. A chaque personnage mentionné, le calife demandait s’il faisait partie des Arabes ou des affiliés arabisés (mawâlî) et az-Zuhrî répondait qu’il faisait partie des mawâlî. Le calife dit à la fin : « Zuhrî, par Dieu, les mawâlî ont pris le dessus sur les Arabes au point de s’adresser à eux depuis les chaires des mosquées. » Az-Zuhrî répondit : « Commandeur des Croyants, il s’agit de la religion de Dieu : ceux qui l’apprennent auront le dessus, et ceux qui la laissent perdre seront dominés. »[23]
La civilisation musulmane a donc été le fruit de ce brassage des différents peuples musulmans : originaires de Perse, de l’empire byzantin, de Grèce, d’Inde, de Turquie ou d’Espagne, ils se sont ralliés à l’islam et ont constitué ensemble la force de ce corps gigantesque. Leurs apports respectifs sont venus alimenter le patrimoine, la civilisation et l’histoire de la nation musulmane étendue sur un immense territoire.
On peut donc dire que chaque civilisation a pu s’enorgueillir de ses génies appartenant à une même ethnie et une même nation, sauf la civilisation musulmane : celle-ci a pu en effet s’enorgueillir des apports conjugués de génies originaires de toutes les nations et de tous les peuples qui ont vécu sous l’égide de l’islam. Perses, Arabes ou autres, tous ont apporté leur contribution. Nous trouvons côte à côte Abû Hanîfa, Mâlik[24], ash-Shâfi`î[25] et Ahmad[26] (les fondateurs des quatre grandes écoles juridiques), comme nous trouvons dans un autre domaine les grands linguistes al-Khalîl[27] et Sîbawayh[28], et de nombreux autres savants d’origines diverses. Tous ces savants étaient simplement des génies musulmans grâce auxquels la civilisation musulmane a apporté à l’humanité les meilleures productions de la pensée humaine saine.[29]
Telle est la nature de la civilisation musulmane, exemple unique de science et de tolérance, qui a su intégrer tous ceux qui vivaient en son sein et en faire surgir le meilleur en termes d’innovation, de renouvellement et d’apport aux connaissances humaines.
[1] Sourate 49, al-Hujurât, verset 13.
[2] Abû Zayd Shalabî, Târîkh al-hadâra al-islâmiyya wal-fikr al-islâmî, p. 67.
[3] Abû Sa`îd al-Hasan ibn Yasâr al-Basrî (21-110H/642-728), grande figure de la génération des Suivants, éminent savant et ascète, est né à Médine et mort à Bassorah. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 2/69-72.
[4] Abû Bakr Muhammad ibn Sîrîn al-Basrî (33-110H/653-729), éminent juriste de Bassorah connu pour sa grande piété. Né et mort à Bassorah, marchand d’étoffes, il était atteint de surdité. Il s’est rendu célèbre par l’interprétation des rêves. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 4/181-182.
[5] Abû `Abdallâh Muhammad ibn Ismâ`îl al-Bukhârî (194-256H/810-870, shaykh al-islâm, imam et hâfiz, il est le plus grand compilateur de hadîth, auteur de al-Jâmi` as-sahîh et du Târîkh. Né à Bukhâra, orphelin très jeune, il est mort dans la région de Samarcande. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 2/104-105.
[6] Abû Hanîfa ibn an-Nu`mân ibn Thâbit al-Kûfî (80-150H/699-767), imam fondateur de l’école hanafite, érudit, juriste et ascète. D’origine perse, il est né et a grandi à Kûfa et est mort à Bagdad. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân, 5/405-414.
[7] Abû al-Hârith al-Layth ibn Sa`d (94-175H/713-791), éminent juriste et spécialiste du hadîth en Egypte. D’une famille originaire d’Ispahan, il est né à Qalqashand et mort au Caire. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 4/127-129.
[8] `Abd al-Hamîd ibn Yahyâ ibn Sa`d, éminent écrivain célèbre pour la perfection de son style. Il était le secrétaire du dernier calife omeyyade Marwân ibn Muhammad et fut tué avec lui à Busayr en Egypte en 132H/750. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 3/228-229.
[9] `Abdallâh ibn al-Muqaffa` (106-142/724-759), écrivain célèbre pour sa prose, né en Irak. Zoroastrien, il se convertit à l’islam sous l’influence de `Îsa ibn `Alî (neveu du calife as-Saffâh) puis est executé sur ordre du calife al-Mansûr al-`Abbâsî. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 2/151-153.
[10] Abû Mu`âdh Bashâr ibn Burd al-`Uqaylî (95-167H/714-784), poète de renom contemporain des califats omeyyade et abbasside, aveugle. Accusé d’hérésie, il fut fouetté à mort. Voir Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 1/271-273.
[11] Abû Nuwâs, al-Hasan ibn Hâni’ ibn `Abd al-Awwal (146-198H/763-814) était le grand poète de l’Iraq à son époque ; libertin, il écrivait sur les plaisirs du vin et de l’amour. Voir al-Baghdâdî, Khazânat al-adab 1/168.
[12] Abû Zayd ash-Shalabî, Târîkh al-hadâra al-islâmiyya wal-fikr al-islâmî, pp. 67-68.
[13] Abû `Abdallâh Muhammad ibn Mûsâ al-Khawârizmî (mort après 232H/847) était un mathématicien, astronome et historien originaire de Khawârizm. Le calife abbasside al-Ma’mûn lui confia la direction de sa bibliothèque et la charge de réunir et de traduire les ouvrages grecs. Voir Ibn an-Nadîm, al-Fihrist, p. 383, et az-Zarkalî, al-A`lâm, 7/116.
[14] Abû `Alî al-Husayn ibn `Abdallâh ibn Sînâ (370-428H/980-1037), connu en français sous le nom d’Avicenne, grand philosophe, auteur de nombreux ouvrages de médecine, de logique, de sciences naturelles et de théologie, est né dans les environs de Bukhâra et mort à Hamdhân. Voir Ibn al-Khallikân, Wafayât al-a`yân 2/157-161.
[15] Abû Bakr Muhammad ibn `Abdallâh ibn Shihâb az-Zuhrî al-Qurashî (58-124H/678-742), juriste et spécialiste du hadîth, savant de Médine de la génération des Suivants. Voir Ibn al-Khallikân, Wafayât al-a`yân 4/177-178.
[16] `Atâ’ ibn Abî Rabâh, né au Yémen puis ayant grandi à La Mecque, était un juriste fiable au sujet duquel al-Awzâ`î a dit : « Je ne connais personne qui craigne plus Dieu que `Atâ’. » Il est mort à La Mecque en 115H. Voir Ibn Sa`d, at-Tabaqât al-kubrâ, 5/467, et Ibn al-Jawzî, Sifat as-safwa, 2/212-214.
[17] Tâwus ibn Kaysân, yéménite d’origine perse, mawlâ affilié au clan de Bahîr ibn Raysân al-Humayrî, est décrit par Ibn Hibbân comme un pieux personnage du Yémen, grande figure de la génération des Suivants ; il est mort en 106H. Voir al-Muzanî, Tahdhîb al-kamâl13/357, et Ibn Hajar, Tahdhîb at-tahdhîb 5/9.
[18] Makhûl ash-Shâmî, Abû `Abdallâh ad-Dimashqî, était un juriste originaire de Kâbil, mort peut-être en 118H. Voir Ibn Sa`d, at-Tabaqât al-kubrâ 7/453.
[19] Yazîd ibn Abî Habîb, Abû Rajâ’ al-Misrî était mufti d’Egypte ; c’était un homme sage et magnanime ; il mourut en 128H. Voir Ibn Hajar, Tahdhîb at-tahdhîb 11/278.
[20] Mahmûd ibn Mahrân, surnommé Abû Ayyûb, est mort en 116H. Voir à son sujet Ibn Khayât, at-Tabaqât, p. 319, et Ibn Hajar, Tahdhîb at-tahdhîb, 10/349.
[21] Abû al-Qâsim ad-Dahhâk ibn al-Muzâhim al-Balkhî al-Khurasânî (mort en 105H/723), était exégète, spécialiste du hadîth et grammairien, et éduquait les enfants. Voir al-Hamawî, Mu`jam al-udabâ’ 4/1452-1453, et Ibn Hajar, Tahdhîb at-tahdhîb 4/397-398.
[22] Abû `Imrân Ibrâhîm ibn Yazîd ibn Qays an-Nakh`î al-Kûfî (46-96H/666-715), éminent personnage et spécialiste du hadîth de la génération des Suivants, mort alors qu’il cherchait à échapper à la répression d’al-Hajjâj. Voir Ibn Sa`d, at-Tabaqât al-kubrâ 6/270-284.
[23] Ibn Kathîr, al-Bâ`ith al-hadîth sharh ikhtisâr `ulûm al-hadîth p. 42.
[24] Mâlik ibn Anas ibn Mâlik al-Asbahî al-Humayrî (93-179H) était l’imam de Médine et l’un des quatre grands imams sunnites, fondateur de l’école malékite. Né et mort à Médine, il était fermement attaché à sa religion et se tenait à l’écart des princes et de la politique. Son principal ouvrage est le Muwattâ’. Voir adh-Dhahabî, Siyar a`lâm an-nubalâ’ 8/48, Ibn Khallikân, Wafayât al-a`yân 4/135, et az-Zarkalî, al-A`lâm 5/257.
[25] Ash-Shâfi`î, Abû `Abdallâh Muhammad ibn Idrîs al-Qurashî (150-206H) est l’un des quatre grands imams, le premier à avoir théorisé la science des fondements de la jurisprudence. Il est né à Gaza et mort en Egypte. Voir adh-Dhahabî, Siyar a`lâm an-nubalâ’ 10/5.
[26] Abû `Abdallâh Ahmad ibn Muhammad ibn Hanbal ash-Shîbânî (164-241H), grand spécialiste du hadîth, a réuni une vaste compilation de hadîth, al-Musnad. Il aurait mémorisé un million de hadîth. Ami d’ash-Shâfi`î dont il demeura proche jusqu’au départ de ce dernier pour l’Egypte, il est né et mort à Bagdad. Voir Ibn al-Khallikân, Wafayât al-a`yân 1/64.
[27] Abû `Abd ar-Rahmân al-Khalîl ibn Ahmad ibn `Amr al-Farâhîdî (100-170H/718-786), philologue, le premier à théoriser la métrique arabe, maître de Sîbawayh, né et mort à Bassorah. Voir Ibn al-Khallikân, Wafayât al-a`yân 2/244-248.
[28] Sîbawayh, Abû Bishr `Amr ibn `Uthmân ibn Qanbar, grand maître de la grammaire arabe et le premier à en avoir défini les règles. Né à Shiraz, il se rendit à Bassorah et étudia auprès d’al-Khalîl ibn Ahmad. Voir Ibn al-Khallikân, Wafayât al-a`yân 3/463-464.
[29] D’après Mustafâ as-Sibâ`î, Min rawâ’i` hadâratinâ, pp. 36-37.
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